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Le 27 mars 2018

Nullité d’une marque pour contrariété à l’ordre public (Tribunal de l’Union Européenne, 9ème ch, 15 mars 2018, La Mafia Franchises, SL/EUIPO,)

La société espagnole La Honorables Hermandad aujourd’hui devenue La Mafia Franchises a déposé en 2006 la marque “La Mafia se sienta a la mesa” que l’on peut traduire par « La Mafia se met à table », enregistrée le 20 décembre 2007.

En juillet 2015 la République Italienne procède à une demande en nullité de cette marque pour contrariété à l’ordre public et aux bonnes mœurs auprès de l’Office de l’Union Européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO).

La première chambre de recours, dans une décision du 27 octobre 2016, confirme la précédente décision de la division d’annulation datant du 3 mars 2016 qui faisait droit à la demande de nullité aux motifs que la marque litigieuse était contraire à l’article 7§1f) du Règlement n°207/2009, prévoyant que la contrariété à l’ordre public et aux bonnes mœurs constitue un motif absolu de refus d’enregistrement d’une marque européenne.

Après un nouveau renvoi de la part du titulaire de la marque, la neuvième chambre du  Tribunal rejette le recours et condamne aux dépens ladite société dans son arrêt rendu le 15 mars 2018.

Ce grand principe du droit des marques, introduit en droit français à l’article L.711-3 b) du Code de la propriété intellectuelle : « Ne peut être adopté comme marque ou élément de marque un signe (…) contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs, ou dont l’utilisation est légalement interdite (…) », s’est vu appliqué pour confirmer la nullité de la marque litigieuse au nom des valeurs démocratiques de l’Union.

Pour être valablement enregistrée, une marque ne doit présenter aucune contrariété à l’ordre public ou aux bonnes mœurs. Cette disposition se justifie au regard de l’importance que les pays européens notamment accordent aux valeurs démocratiques constituant le socle de notre République et de ses normes en vigueur. L’idée est ainsi de garantir une protection des valeurs occidentales et la sécurité des citoyens des Etats Membres, d’autant plus fragilisées par le contexte d’insécurité que nous connaissons depuis les attentats de 2015 et les mesures d’Etat d’urgence proclamées en France depuis lors.

Le signe déposé en l’espèce comportait une inscription prépondérante : « la Mafia » sous laquelle en figurait une seconde en police plus petite « se sienta a la mesa », le tout sur fond noir accompagné d’une rose rouge.

Le Tribunal de l’EUIPO confirme la demande en nullité au regard du terme « Mafia », élément central du signe déposé. Si ce terme est compris par la population italienne, il l’est également pour un grand nombre de citoyens européens. De fait, son association inéluctable aux groupes criminels italiens explique la position du Tribunal de le déclarer contraire à l’ordre public. Les juges européens considérant que les activités de ces organisations criminelles, connues pour leurs atteintes graves et répétées à l’ordre public (degré important de violence ; absence de morale) sont contraires aux valeurs sur lesquelles a été fondé l’Union européenne et ses institutions, la marque doit être annulée. Cette référence inévitable fait de cette marque un signe présentant un caractère « choquant ou offensant » et ce dans un grand nombre de pays de l’Union. C’est la raison pour laquelle sa contrariété à l’ordre public n’est pas étonnante.

De plus, l’association du terme litigieux à l’inscription que l’on peut traduire par « se met à table » parallèlement à la rose visible en arrière plan, présente selon l’analyse des juges européens, une image adoucie de ces groupes criminels créant un risque de banalisation de leurs activités illicites et de leur gravité.

Ainsi, comme une marque doit être appréciée et analysée selon son impression visuelle d’ensemble, il ressort en l’espèce de l’impression globale du signe déposé une image positive de ces organisations criminelles pourchassées et condamnées par l’Etat italien ainsi que par l’Union.

La lutte actuelle et permanente menée par l’Etat italien mais également par d’autres Etats Membres contre ce type de groupement criminel explique l’évidence de cette décision de rejet d’une marque aujourd’hui surement plus que jamais contraire à un ordre public qu’il convient de préserver.

L. LEVEQUE

Y. LORANG

 

 

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