LA PROTECTION PAR LE DROIT D’AUTEUR: CONTREFAÇON D’UNE PHOTOGRAPHIE ORIGINALE DE JIMI HENDRIX

Cour d’appel de Paris, Pôle 5, Chambre 1, 13 juin 2017 n°147/2017

La société EGOTRADE, spécialisée dans la vente de cigarettes électroniques a utilisé comme affiches publicitaires à la fois sur son site internet et pour la devanture de ses boutiques une photographie de Jimi HENDRIX, objet du litige.

Monsieur Gered MANKOWITZ, célèbre photographe britannique ayant photographié les plus grands chanteurs et groupes de rock est l’auteur de ce cliché réalisé en février 1967, dont il a par la suite cédé les droits patrimoniaux à la société BOWSTIR LTD portant sur l’ensemble de ses photos prises entre 1963 & 1985.

Après avoir mis en demeure la société EGOTRADE de retirer sans délais les affiches et visuels reproduisant la photographie de Jimi HENDRIX, la société BOWSTIR et M.MANOWITZ l’ont assignée devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de droit d’auteur.

Aux termes d’un jugement assez surprenant du 21 mai 2015, le TGI de Paris va déclarer irrecevable les demandes des plaignants, et notamment celles relatives à la contrefaçon de la photographie en question.

Appel est aussitôt interjeté, offrant à la Cour d’appel de Paris la possibilité d’infirmer le jugement du TGI et de confirmer la contrefaçon.

Dans cette affaire, si la titularité des droits d’auteur n’est pas contestée, l’originalité, quant à elle, restait à prouver.

La justification des demandeurs va dès lors être aussi précise qu’irréprochable à travers la description de la scène éligible au droit d’auteur : la photographie « en noir et blanc en plan taille de face de Jimi HENDRIX expirant, avec un demi-sourire et les yeux mi-clos, une bouffée de la cigarette qu’il tient dans sa main gauche, sa main droite soutenant son bras gauche au niveau du coude » a été capturée par M.MANKOWITZ qui a « guidé et dirigé Jimi HENDRIX lors de la prise de vue et qui lui a demandé de prendre la pose reproduite sur la photo en cause », choisissant avec précision « le décor, l’éclairage, l’angle de vue et le cadrage ». De plus, si elle reste en noir et blanc c’est « afin de donner plus de contenance à son sujet et donner de lui l’image d’un musicien sérieux », le choix de l’appareil n’avait lui non plus pas été laissé au hasard afin d’apporter « un touche de grand angle au portier sans créer de distorsion ».

L’originalité de l’oeuvre ainsi prouvée, c’est au visa de l’article L122-4 du Code de la propriété intellectuelle que la contrefaçon est prononcée : non seulement le cliché avait été utilisé sans accord et sans mention du nom de l’auteur (contrefaçon de droit moral), mais elle avait en plus été dénaturée (atteinte au respect), la cigarette ayant été remplacée par une cigarette électronique.

Sans compter le préjudice moral et l’atteinte aux droits d’auteur (droit patrimonial), l’utilisation à des fins commerciales aura surtout « incontestablement banalisé et affaibli sa valeur économique.

Finalement, la société EGOTRADE sera condamnée au paiement de la somme de 50.000€ à la société BOWSTIR, 25.000€ au à M.MANKOWITZ, et 15.000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, une note salée pour l’utilisation de la photographie d’une légende du rock…

Y. Glaoua

Y. Lorang