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Le 31 mars 2018
Propriété intellectuelle/ droit d'auteur/ photographe/ titularité/ défaut d'empreinte de la personnalité de l'auteur/ choix artistiques/ preuve de l'originalité/ rejet de la contrefaçon/ Avocat Lyon/ Lorang Avocats

Amis photographes : gare aux clichés trop politiquement « corporate » (Cour d’appel de Paris, 23 mars 2018 RG n°17/10231)

Photographies « corporate » de dirigeants : rappel de l’obligation pour le photographe de soigner sa mise en scène et ses choix artistiques, à défaut de quoi la protection au titre du droit d’auteur sera refusée !

 

Monsieur Z exerce la profession de photographe depuis 1986 à travers une société qu'il dirige. C’est un professionnel habitué aux photographies pour la publicité, la mode, ainsi que pour la presse…etc.

 

Après avoir été contacté par une société qui souhaitait faire réaliser des photographies de son Président en exercice, le photographe adresse un devis, lequel est accepté puis signé par sa cliente.

 

La prestation comprenant la prise de vue, le maquillage, les retouches, est réalisée par le photographe, pas moins de 558 clichés étant pris du Président, le devis mentionnant que les droits d'utilisation des images pour le site Internet et la diffusion presse sont valables pour une durée de deux ans, les droits d’auteur étant cédés pour « dossier de presse, communication, internet ».

 

Arguant du fait que les photographies avaient été diffusée au-delà de la période fixée initialement à deux ans, mais aussi que son nom n’était pas mentionné et que les photographies avaient été reproduites sur des supports non autorisés par le photographe, ce dernier s’est plaint du fait que le périmètre de la cession (prévu et encadré par l’article L.131-3 du CPI) avait été dépassé et sollicitait que son droit moral soit respecté.

 

Il invitait alors sa cliente à renouveler les droits d’utilisation des clichés en adressant directement ses factures pour forcer la régularisation des cessions et des droits y afférents.

 

La cliente n’a pas réglé les sommes demandées et, tout en reconnaissant le bienfondé des demandes du photographe, propose alors une somme forfaitaire à titre transactionnel, arguant notamment du fait que le dirigeant ne faisait plus partie de l’effectif de l’entreprise.

 

N’obtenant pas satisfaction, le photographe assigne devant le TGI de Paris sa cliente en réparation de son préjudice né de la violation de ses droits patrimoniaux et de l’atteinte à son droit moral (droit au nom).

 

Par jugement en date du 4 mai 2017, le Tribunal a :

 

- déclaré Monsieur Z et sa société irrecevables à agir sur le fondement du droit d'auteur à l'encontre de la société,

- débouté Monsieur Z et sa société de leurs demandes subsidiaires fondées sur le parasitisme et l'enrichissement sans cause comme mal fondées,

- débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Monsieur Z et sa société aux dépens.

 

Le photographe et sa société interjettent appel de la décision et demandent logiquement à la Cour d’infirmer le jugement dans toutes ses dispositions.

 

La Cour, constatant que l'action de Monsieur Z et de sa société n'est fondée, en cause d'appel, que sur le droit d'auteur, relève que les appelants ne justifient, ni n'allèguent d'aucune titularité d'un quelconque droit d'auteur au profit de la société qui n’a légalement pas acquis les droits d’auteur.

 

La société est logiquement déclarée irrecevable en son action fondée sur le droit d'auteur.

 

La Cour observe par ailleurs que rien ne permet d'identifier les 3 photographies utilisées parmi les 558, objets de la cession et que Monsieur Z n'identifie pas précisément l'originalité des deux photographies dont il incrimine l'utilisation contrefaisante.

 

Monsieur Z s’est toutefois essayé à justifier l’originalité des photographies par le choix du cadrage du visage, l’éclairage sélectionné et l'environnement neutre choisi avec un fond uniforme gris, le tout permettant de capter une expression décontractée du visage du Président, puis le traitement postérieur du cliché et par le biais des retouches, la présence d'une maquilleuse…etc.

 

Pour autant, au visa des articles L.111-1 et L.112-1 du CPI, la Cour retient que le choix d'éclairage n'est pas explicité, pas même que le choix du fond uniforme neutre, la mise en lumière, Monsieur Z échouant à prouver l'empreinte de sa personnalité, rejetant ainsi tout bénéfice du droit d'auteur pour les photographies.

 

La Cour rappelle qu’il appartient à celui qui revendique le droit d'auteur sur des photographies de les identifier, condition de recevabilité de la demande, et de préciser la combinaison des caractéristiques de l'oeuvre ou des oeuvres qui pourrait être éligible à la protection par le droit d'auteur.

 

De manière assez sévère, Monsieur Z est déclaré irrecevable en son action fondée sur le droit d'auteur et est condamné à payer à son ancien client la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Voilà un photographe qui soignera désormais ses mises en lumières et ses choix artistiques de photos « corporate », tout en cédant ses droits d’auteur à un prix supérieur et pour toute la durée de protection des droits d’auteur.

Yann Lorang

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Avocat à Lyon, Maître Yann Lorang conseille de nombreux clients venant de Villeurbanne, Caluire-et-Cuire, Sainte-Foy-lès-Lyon, Tassin-la-Demi-Lune, Écully, Oullins, Saint-Fons, Bron, Pierre-Bénite, Francheville, Vaulx-en-Velin, Vénissieux, Saint-Génis-Laval, Rilieux-la-Pape, Décines-Charpieu et d’ailleurs.